« Monsieur le Directeur du programme, le Dr Mathanzima Mweli,
Madame la ministre de l’Éducation de base, Mme Angie Motshekga,
Monsieur le Secrétaire exécutif de l’ADEA, M. Albert Nsengiyumva,
Mesdames et messieurs les ministres de l’Éducation d’autres pays africains,
Mesdames et messieurs les hauts fonctionnaires et éducateurs et éducatrices issu(e)s de l’ensemble des contrées de notre continent,
Mesdames et messieurs les membres du Corps diplomatique,
Mesdames et messieurs les représentants des médias, Mesdames et Messieurs,
C’est pour moi un honneur et un plaisir d’accueillir l’Association pour le développement de l’éducation en Afrique et tous les délégués à ce Forum ici en Afrique du Sud.
Nous sommes honorés que vous nous ayez donné l’occasion d’abriter ce Forum annuel de dialogue politique de haut niveau, l’année où nous célébrons nos 25 ans de liberté et de démocratie.
Pour nous, l’avènement de la démocratie – qui a conduit à la création d’un système éducatif unique – a été une avancée majeure vers le rétablissement de la dignité de millions de Sud-africains auxquels une éducation de qualité avait été déniée pendant des siècles de colonialisme et des décennies d’apartheid.
L’accent mis par ce Forum sur le thème « Préparer les jeunes au monde du travail » reflète notre compréhension du fait que le dividende démographique de l’Afrique ne peut être exploité que par notre investissement dans la ressource la plus performante du continent, à savoir sa population jeune.
Je suis convaincu que l’ampleur, la profondeur et la qualité des débats qui auront lieu au cours des prochains jours enrichiront en définitive le développement du capital humain de notre continent et nous rapprocheront de la réalisation de l’Agenda 2063 de l’Union africaine.
Nous espérons partager notre expérience et apprendre d’autres pays sur la façon de relever ces défis.
L’Afrique compte une forte proportion de jeunes âgés de moins de 25 ans.
Ils représentent environ un cinquième de toutes les personnes âgées de moins de 25 ans dans le monde.
En outre, la recherche montre que 37 % des 600 millions de membres de la population active de l’Afrique subsaharienne ont moins de 25 ans.
C’est un grand avantage pour l’Afrique, étant donné que la plupart des pays développés ont une population vieillissante.
Ils ont besoin de jeunes pour travailler et développer leur économie, tout en contribuant aux impôts pour subventionner les programmes sociaux en faveur des personnes âgées.
Nous, en Afrique, pouvons exploiter ce dividende démographique si nous développons des systèmes éducatifs appropriés, accessibles et ciblés.
Malheureusement, nos économies ne sont pas à même d’absorber une proportion importante de ces jeunes, principalement parce que le système éducatif n’est pas adapté aux besoins de l’économie.
Le taux de chômage des jeunes est environ deux fois plus élevé que celui des adultes plus âgés.
Fait significatif, la plupart des jeunes chômeurs à travers l’Afrique sont ceux qui ont achevé leurs études secondaires ou supérieures.
Le taux de chômage est plus faible chez ceux qui ont peu ou pas d’instruction.
Vous vous demandez peut-être comment cela est possible.
L’agriculture est le plus gros employeur et, pour l’instant, elle est à forte intensité de main-d’œuvre et nécessite des travailleurs qui, dans la plupart des cas, sont sans instruction.
Ceux qui ont achevé leurs études secondaires ou supérieures ont du mal à trouver un emploi.
Cela est dû, entre autres, à une inadéquation entre les compétences que les gens acquièrent et les besoins du marché.
Avec l’avènement de la Quatrième Révolution industrielle, il est des risques que cette inadéquation s’accentue.
Du fait du déficit de compétences, nos pays sont mal préparés aux changements technologiques.
Nous devons donc changer l’orientation de l’enseignement secondaire si nous entendons développer des compétences pertinentes pour le nouveau type d’économie.
La Quatrième Révolution industrielle perturbe également le marché du travail.
La dynamique de l’activité économique est en train de passer des très grandes entreprises aux petites entreprises dirigées par des particuliers.
Un entrepreneur qui développe son produit dans un garage est désormais plus susceptible de créer davantage d’emplois dans la chaîne de valeur qu’une grande entreprise manufacturière.
Bien qu’il demeure un important moteur de croissance, le secteur manufacturier ne génère pas autant d’emplois que dans les décennies antérieures.
Nous constatons un accroissement plus marqué du nombre de chômeurs en raison de l’utilisation de la technologie pour remplacer les travailleurs.
Ces changements ont un impact sur la nature des compétences requises.
Les jeunes ont besoin de compétences cognitives de base dans les domaines de la science, de la technologie, de l’ingénierie et des mathématiques – les compétences dites STIM – pour être absorbés dans l’économie.
Comme convenu dans l’Agenda 2063, parmi ceux qui entrent dans les établissements d’enseignement supérieur, 70 % devraient, dans l’idéal, obtenir un diplôme dans les matières des STIM.
Les compétences numériques, telles que le codage, sont essentielles à l’intégration dans le monde du travail.
Ces compétences devraient être accompagnées de compétences non techniques telles que l’intelligence émotionnelle, les compétences interpersonnelles et d’excellentes aptitudes à la communication.
Au lieu d’un apprentissage par cœur, la Banque mondiale indique que les jeunes ont besoin de compétences en résolution de problèmes et en raisonnement non structurés.
La pensée critique est le facteur qui permettra de tirer la création d’emplois et la croissance économique à l’avenir.
Nous devons changer nos systèmes éducatifs pour développer ces compétences.
On s’attend à ce que l’Afrique soit le grenier du monde en raison de sa position géographique et de son climat, ainsi que de sa forte population de jeunes.
La Banque mondiale estime que notre marché agricole produira des aliments et des boissons d’une valeur de 1000 milliards de dollars EU à l’horizon 2030.
Étant donné que 205 millions de personnes en Afrique travaillent dans le secteur agricole, nous devons veiller à ce que nos écoles secondaires mettent l’accent sur la technologie agricole.
Nous devons veiller à ce que les jeunes puissent à la fois lire pour comprendre et appliquer les connaissances dans les domaines de l’agro-transformation, de la valorisation des produits frais et des normes requises pour l’exportation de produits alimentaires.
Les jeunes doivent avoir des compétences axées sur la chaîne de valeur agricole.
La deuxième source d’emplois en Afrique est le secteur des services, qui a, selon les estimations, employé plus de 100 millions de personnes en 2015.
Ce secteur comprend l’information, la communication et les technologies.
Il comprend également les services à la clientèle, les ventes et les ressources humaines dans des domaines tels que le divertissement, la restauration, le tourisme et les transports.
Ces domaines sont susceptibles de connaître un essor.
Par conséquent, les jeunes ont besoin à la fois de compétences techniques et de compétences « générales ».
Nous devons surmonter certains obstacles si l’Afrique entend créer de nouveaux emplois.
En premier lieu, nous avons besoin d’éducateurs qualifiés pour travailler dans l’économie moderne.
Beaucoup de nos enseignants ont été formés dans l’ancien système d’apprentissage par cœur.
Souvent, ils ne sont pas en mesure d’utiliser les outils avancés du métier tels que les ordinateurs.
La plupart d’entre eux n’ont pas été formés à l’application des connaissances, mais plutôt à l’accumulation des connaissances.
Dans le monde d’aujourd’hui, l’information et les connaissances sont abondantes.
La clé est d’appliquer les connaissances dont nous disposons pour résoudre les problèmes.
En second lieu, nos éducateurs doivent savoir comment élaborer un programme d’enseignement pertinent pour l’économie.
Ils devraient travailler en partenariat avec le secteur privé pour concevoir et mettre en œuvre un programme d’enseignement qui améliore les compétences fondamentales de base.
Les pays qui réussissent sont ceux qui s’assurent que les compétences qu’ils produisent sont appropriées à leur industrie.
Après tout, le secteur privé accueillera bon nombre de ces diplômés du secondaire.
Ils doivent donc absorber les diplômés beaucoup plus facilement.
Tous les apprenants ne sont pas qualifiés pour s’engager dans la voie universitaire.
Les pays où 50 % des apprenants entrent dans les instituts techniques pour développer les compétences artisanales ont des taux de chômage des jeunes inférieurs à ceux où la grande majorité des apprenants entrent dans les établissements d’enseignement supérieur.
L’hypothèse que nous émettons souvent selon laquelle chaque apprenant est destiné à entrer dans un établissement d’enseignement supérieur doit être reconsidérée, et nos systèmes d’enseignement secondaire doivent être restructurés en conséquence.
Nos écoles doivent s’inscrire dans le cadre d’une réponse sociétale globale aux défis et possibilités de la Quatrième Révolution industrielle.
Les progrès technologiques rapides ont déjà des conséquences importantes pour les travailleurs et les communautés, le passage au numérique et la mécanisation des processus de travail entraînant une insécurité accrue et des pertes d’emplois.
La Quatrième Révolution industrielle est notre réalité actuelle et elle n’attend ni homme, ni femme, ni gouvernement, ni apprenant, ni étudiant, ni employeur, ni syndicat.
Alors que nous relevons les défis de la Quatrième Révolution industrielle, nous devrions – en tant que continent et en tant que communauté mondiale – placer les personnes au cœur des politiques économiques et sociales et des pratiques commerciales.
Les forces dynamiques qui transforment le monde du travail sont à l’origine de possibilités remarquables, mais aussi de défis à relever.
Pour aider la société mondiale à relever ces défis et à saisir ces possibilités, nous devons investir dans les capacités de la population.
L’enseignement secondaire joue un rôle crucial dans nos efforts pour mettre les peuples de notre continent sur la voie d’un développement durable et inclusif qui bénéficiera à l’humanité toute entière.
L’enseignement secondaire intervient dans la vie des jeunes à un moment où ils ont le plus d’énergie, mais aussi où ils sont le plus vulnérables aux influences sociales nocives.
L’enseignement secondaire donne aux jeunes les moyens d’agir à un moment où ils ont le plus d’espoir, sont plus enclins à l’expérimentation et ont plus de flexibilité dans leur vie, et nous devrions considérer cette étape de leur vie comme une étape qui leur permet de prendre en main leur vie et notre avenir collectif.
Mais, cela signifie qu’ils doivent acquérir les fondamentaux plus tôt dans leur vie.
Sans la réalisation de ces objectifs, nous n’avons aucune chance de réussir la Quatrième Révolution industrielle ou de passer d’un continent de consommateurs à un continent d’innovateurs et d’inventeurs.
Nous nous sommes également engagés à viser les horizons les plus lointains.
Cela ne signifie pas vivre dans le déni des défis qui nous affectent, mais plutôt mettre en œuvre des solutions réalistes et d’envergure pour les relever.
En tant que hôte et participante à ce Forum, l’Afrique du Sud a beaucoup à apprendre et à tirer des discussions qui se dérouleront ici.
Nous attendons avec intérêt les résultats de ce Forum comme une impulsion pour changer le sort des jeunes Africains et donc celui de la société humaine dans son ensemble.
Je vous souhaite une fois de plus la bienvenue et de fructueuses délibérations.
Je vous remercie. »
Source : La présidence, République d’Afrique du Sud